C’est sur toutes les lèvres: « nous voulons une (commission d’) enquête (publique) ! »
Mais pas sur les miennes.
Pour être franc, je n’y crois pas. Pas du tout, même. Les mots entre parenthèses expliquent mes motifs.
1- Une commission d’enquête publique, ce n’est pas une enquête. Une enquête, une vraie, c’est la police qui la gère. Avec des moyens policiers, comme de l’écoute électronique, de la filature, des arrestations, des interrogatoires serrés.
2- Une commission d’enquête publique permet le mensonge. Les témoins jouissent d’une immunités, la même qui a permis à l’adéquiste Sylvie Roy de prétendre que des ministres du gouvernement avaient été sur le bateau du désormais célèbre M. Accurso. Elle savait que c’était faux, mais l’immunité permet de dire tout ce que l’on veut.
3- Une commission d’enquête publique permet l’oublie. Rappelons Gomery. Tous ceux qui savaient quelque chose n’ont eu qu’à afficher un large sourire en mentionnant: « je ne me souviens plus ». La commission Gomery a confirmé l’adage: ceux qui savent ne parlent pas, ceux qui parlent ne savent rien. Ainsi, tout ce que l’on retient de Gomery, c’est l’impression que tout le monde était coupable de quelque chose, mais à peu près personne n’a été arrêté.
4- Une commission d’enquête publique, c’est une commission. Une commission, ça n’enquête pas. Ça écoute des témoignages. Vrais comme faux. Ça ne peut rien vérifier. Ce sont des personnages publiques du monde politique qui ne font qu’écouter d’autres personnages publiques et, ultimement, qui écrivent un rapport.
5- Une commission d’enquête publique, ça remplit des pages de journaux, alors qu’une enquête policière, ça remplit des prisons. Rappelons les deux seules grandes commissions d’enquête publique du Québec: la commission Cliche et la commission Gomery. Immense couverture médiatique pendant plusieurs années, mais à peu près personne en prison. 4 pour Gomery, 2 pour Cliche.
6- Une commission d’enquête publique, c’est un spectacle gratuit. Rappelons ceci: des enquêteurs policiers, ça fait peur. Des caméras, ça fait sourire. Les témoins, devant les caméras, se préparent, se mettent beaux, rédigent des déclarations révisées par des professionnels. À l’inverse, les témoins, hors des caméras, devant 3 enquêteurs que ne sourient pas, voient leur mémoire revenir assez vite. Et la police, ça n’aime pas les discours.
7- Une commission d’enquête publique, c’est pour les médias. Ça vend. Parce qu’on entend des soupçons, des doutes, des impressions, des ça-a-l’air-que. Les médias vivent du doute. Or, qui nous rappellent, jour après jour depuis des semaines, que ça prend absolument une commission d’enquête publique pour continuer à vivre ? Les mêmes médias qui ont largement bénéficié de Gomery.
8- Une commission d’enquête publique, ça retarde et ça nuit aux enquêtes policières. Les témoignages à la commission ne peuvent pas être récupérés par la police. C’est illégal. Les témoins jouissent d’une immunité. Alors que, devant la police, on le sait, tout ce que l’on dit peut être retenu contre nous. On ne ment pas, et si on oublie, on risque beaucoup.
Je crois à la police pour enquêter. Je crois aux personnages publiques pour animer le monde publique.
C’est deux mondes.